Travail et Vie : un nouvel accueil de jour non-mixte pour les femmes.


DAPAT a interviewé Travail et Vie, un accueil de jour mixte qui est en train d'ouvrir un lieu spécifique pour répondre aux besoins des femmes.

Présentation de l'association

Travail et Vie

Localisation : Pontarlier (25)

Catégorie : Accueil de jour pour personnes sans abris

Date de création : 1992

Site internet : Travail et Vie

Travail et Vie est un accueil de jour pour personnes en situation de précarité sur Pontarlier (25). L’association propose une réponse aux besoins primaires : manger, se laver, laver son linge, avoir accès à internet et au téléphone. Pour répondre au besoin d’accueil des femmes victimes de violence, Travail et Vie a ouvert en 2022 un espace accueil de jour qui leur est dédié et qui peut les accueillir, avec leurs enfants, en toute quiétude et sécurité. 

3 questions à Travail et Vie

  • Quelle est l’histoire de la genèse de votre association et les motivations derrière sa création ?

Née de la volonté de venir en aide aux plus démunis et aux plus souffrants, l’Association TRAVAIL ET VIE fut créée en décembre 1992 (loi 1901), à l’initiative d’un groupe de neuf personnes. Les premières actions menées furent d’aller à la rencontre des SDF, des personnes alcoolisées qui vagabondaient en ville, à Pontarlier (25), de leur proposer un café, de les écouter et de leur proposer une aide dans leur démarche pour un accès aux soins, aux droits, à l’hébergement/ logement et à l’insertion.

En 1995, Simone VEIL alors ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville, demande aux villes de plus de dix mille habitants de prévoir un accueil de nuit ouvert et accessible à toute personne en situation de sans abrisme. Le Maire de la ville de Pontarlier, demande alors au fondateur de l’Association TRAVAIL ET VIE, Roland LEFEVRE, connu pour ses actions auprès des SDF, d’assurer la gestion de l’accueil de nuit 7 jours sur 7 et 365 jours par an. Un local de soixante mètres carrés est mis à disposition.

Le dispositif repose alors essentiellement sur Roland LEFEVRE, responsable et salarié unique de l’association, qui accepte de passer la quasi-totalité de ses nuits en compagnie des personnes accueillies (souvent très alcoolisées). Quelques bénévoles s’organisent et prennent parfois le relais, mais le rythme reste difficile à tenir et une seconde personne est finalement embauchée pour assurer la continuité du service d’accueil de nuit. En 1995, l’association TRAVAIL ET VIE devient le premier maillon permettant à toute personne démunie, d’être aidée (dans sa globalité) à retrouver dignité, confiance, sécurité, santé.

30 ans ont passé et le fonctionnement de l’association a évolué, au fil des besoins, de la création de nouveaux dispositifs (…). Aujourd’hui seul l’accueil de jour est assuré (un partenaire gérant les nuits) mais il s’agit déjà d’une lourde tâche qui occupe maintenant 5 salariés.

La philosophie de l’association est toujours restée la même : recueillir les plus démunis pour survivre aux nuits glaciales, leur apporter un brin de confort, de réconfort, de chaleur humaine et de subsistance, tout en les écoutant et les aidant à retrouver confiance et dignité. L’Accueil est inconditionnel (sans condition de sexe, d’orientation religieuse, politique ou sexuelle…)

  •  Quelles sont vos perspectives d’évolution ?

Notre accueil de jour permet en premier lieu d’assurer une réponse aux besoins primaires des plus démunis (se restaurer, se laver, laver son linge, se reposer, avoir accès à internet et au téléphone…). Nous jouons également un rôle primordial dans la veille sociale et suivons en permanence l’état de santé, physique et psychique, les soucis du quotidien,… et pouvons réagir rapidement et orienter vers les structures adéquates. Aussi nous sommes pour ces publics, le premier vecteur de resocialisation ainsi que le premier tremplin vers la réinsertion (de multiples activités sont initiées en ce sens).

Depuis 2 ans, nous travaillons à répondre aux besoins du territoire en adaptant, faisant évoluer les lignes (les projets sont nombreux, voici quelques exemples):

  • Création d’un espace accueil de jour dédié aux femmes victimes de violences et à leur enfants : de fait, dans notre secteur rural, ces femmes nous étaient orientées, mais le mélange avec notre public historique n’est pas indiqué (addictions, possible violence…). Nous avons donc réhabilité une surface brute de 80m², totalement indépendante et sécurisée pour les accueillir et les accompagner en journée comme dans un cocon (travaux finalisés en avril 2022)
  • Mise en place d’un espace « Ecoute Médicale Â» avec une permanence santé toutes les semaines faite par une infirmière et/ou un médecin afin d’aider tous nos publics à renouer avec le soin : parler, être examiné puis orienté vers le bon professionnel… être accompagné dans les démarches, les RDV et l’observance du traitement.
  • Mise en place d’atelier de socio esthétique afin de travailler l’estime de soi mais aussi de procurer un instant de répit, et de détente.
  • Mise en place de permanences bimensuelles au sein de la structure, du CSAPA (service addictologie de l’hôpital)
  • Remobilisation par des activités sportives – randonnées, golf, squash, badminton…
  • Remobilisation par la participation solidaire à différents ateliers sur le principe « Je reçois, donc je donne Â» : travaux de nettoyage pour la Banque Alimentaire, chantiers solidaires avec l’association ATD Quart Monde, confection de friandises pour d’autres publics en difficulté suivis par des associations du secteur, tri pour des associations de collecte de vêtements, bijoux, livres…
  • Mise en place d’un véritable espace informatique équipé de manière à accueillir différents ateliers d’apprentissage (word, faire un CV, faire une lettre de motivation, gérer ses divers comptes en ligne…) – effectif en septembre 2022

Quelques mots sur les détresses spécifiques aux femmes et la nécessité d’agir pour elles ?

« Vivre Â» à la rue est pour chaque être humain, une expérience de vie extrêmement difficile (les conditions climatiques, la faim/soif, l’addiction, l’inconfort, la santé, le temps, la violence… tout est problématique). Mais pour une femme la difficulté relève concrètement de l’enfer sur terre.

Au-delà de tous les éléments cités plus haut, le fait même d’être née femme pose problème… obligation de se grimer pour ne pas ressembler à une femme (vêtements amples, capuche…) car être une femme dans la rue, c’est se faire tabasser et voler, simplement parce que la force physique est disproportionnée ; c’est être violée parce qu’il n’y a plus de barrières, ni de règles (on estime qu’une femme sans abri est violée toutes les 8 minutes) ; c’est parfois vendre la seule chose que l’on possède  - son corps - pour de l’argent, du troc, des drogues… C’est aussi être prostituée par des compagnons de fortune, pour le « collectif Â»â€¦

Ces situations ne s’améliorent pas forcément avec un toit (hébergement ne veut pas dire logement et conditions de vie décentes). Dans un contexte où pour s’en sortir le plus fort prend l’ascendant sur le plus « faible Â», les femmes (tout comme les personnes porteuses de handicap) sont souvent abusées : logement squatté, revenus volés, emprise…

La précarité, qu’elle soit conjuguée avec une situation de sans abrisme, avec une situation de violence conjugale, ou tout autre situation, revient la plupart du temps à une négation de la féminité, pour se protéger mais par manque de moyens également (manques alimentaires, précarité menstruelle, éloignement du soin – que ce soit global ou gynécologique, grossesses non désirées…).

Il est donc essentiel de leur proposer une aide adéquate, dédiée et des lieux où elles peuvent être en sécurité pour leur permettre de reprendre leur souffle. C’est ce à quoi nous nous employons chaque jour.


Si vous aussi vous voulez agir, passez à l’action aux côtés de Travail et Vie ! Pour cela, vous pouvez :

  • Faire un don financier à Travail et Vie. Pour cela, RDV sur la page HelloAsso de l'association.