COMPRENDRE POUR AGIR
Le 22 octobre dernier à Villeurbanne, une journée organisée avec VIFFIL SOS Femmes a donné la parole aux enfants victimes de violences intrafamiliales.



Nathalie BOUCHON POIROUX I Psychologue clinicienne
L’impact sur l’enfant : une blessure invisible mais profonde
Les violences intrafamiliales subies par les enfants constituent des traumatismes récurrents dont les répercussions peuvent persister à l’âge adulte.
Ces expériences marquantes influencent durablement divers aspects de la vie du jeune adulte, avec une intensité variable selon les situations. Ces enfants grandissent « cassés de l’intérieur», avec une mémoire traumatique enfouie : « Relève et marche n’est pas applicable aux enfants» Neige Sinno. En effet l’exposition répétée à des situations de violence altère profondément le développement psychique de l’enfant. Elle affecte son estime de soi, ses capacités à se projeter, ses relations futures. Certains enfants internalisent, se taisent, s’effacent, tentent de devenir « parfaits » pour éviter d’aggraver les tensions. D’autres extériorisent : agitation, agressivité, comportements à risque. Les études nord-américaines sur le contrôle coercitif ont révélé un mécanisme redoutable : l’impuissance apprise, une forme de résignation qui limite la capacité à se défendre ou à s’échapper. Il est donc important de favoriser tout ce qui donne le courage d’agir afin de combattre cette impuissance, qui n’est pas une fatalité.
Neige Sinno reprend les mots de Virginie Despentes, « Avoir le courage et l’audace de s’en remettre, ne pas accepter d’être détruit»Triste Tigre.
« Nous ne pouvons plus détourner le regard. Les enfants victimes de violences intrafamiliales sont encore trop souvent invisibles.Cette journée est là pour briser ce silence, unir nos forces et transformer la compréhension en action.»

Danielle DE GIOVANNI
Fondatrice du Fonds de Dotation DAPAT
Afin de mettre en lumière cette réalité trop souvent ignorée, Charlotte Baelde, présidente du Centre Hubertine Auclert, a présenté les recommandations du rapport « Mieux protéger et accompagner les enfants co‑victimes des violences conjugales ».
« Ces enfants ne sont pas de simples témoins, ils sont des victimes à part entière »
Sensibiliser pour mieux protéger
La première urgence identifiée par le Centre Hubertine Auclert est de renforcer la sensibilisation sociétale. « Tant que la société ne prendra pas pleinement conscience des conséquences dévastatrices de ces violences sur les enfants, l’action restera insuffisante ». Le rapport appelle ainsi à une véritable prise de conscience collective de l’ampleur et de la gravité de ces situations.
Sécuriser et accompagner
Au-delà de la sensibilisation, deux enjeux concrets se dessinent : améliorer l’accès des enfants victimes et de leurs mères aux dispositifs de mise en sécurité, et renforcer les dispositifs d’accompagnement et de soins. « La reconstruction passe nécessairement par un accompagnement adapté, permettant aux enfants et à leurs mères de se libérer des traumatismes subis ».
Former les professionnels, reconnaître les victimes
Le rapport met également l’accent sur la formation de tous les professionnels en contact avec ces familles. Comprendre les mécanismes des violences conjugales est indispensable pour mieux repérer et accompagner les victimes. Le rôle central de la protection de l’enfance dans la détection des enfants co-victimes est également souligné. Sur le plan juridique, une avancée majeure est préconisée : reconnaître pleinement l’enfant comme victime de violences psychologiques lorsqu’il est exposé aux violences conjugales, même sans en être directement ciblé. « L’intérêt et la sécurité de l’enfant doivent primer dans toutes les décisions relatives à l’autorité parentale ».
Renforcer la coopération
Enfin, le rapport appelle à renforcer la coopération interinstitutionnelle entre tous les acteurs concernés. « Seul un travail en réseau harmonisé permettra d’améliorer véritablement la prise en charge de ces enfants co-victimes ».


Nombreux sont les acteurs qui se sont mobilisés pour partager leurs récits, témoignages et expertises, avec un seul objectif : faire entendre et reconnaître la voix des enfants exposés aux violences.

Mathieu PALAIN
Journaliste et auteur de « Sale gosse » et « Ne t’arrête pas de courir »

Clarisse LOE LOUMOU
Pédiatre, médecin de la parentalité et cofondatrice de « La Margelle«

Charlotte MILLON
1ère Vice-Procureure de la République, cheffe de la section mineurs-familles du Parquet de Lyon

Isabelle ALTEMEYER
Cheffe de service, Centre maternel Marie Béquet de Vienne, Paris

Céline JOSSERAND
Directrice adjointe, VIFFIL SOS Femmes, et vice-présidente de la Fédération Nationale Solidarité Femmes

Pauline ESPI
Pédopsychiatre à l’UAPED (Unité d’accueil pédiatrique pour enfants en danger)

Guillaume de la CHAPELLE
Pédopsychiatre à l’UAPED (Unité d’accueil pédiatrique pour enfants en danger)

Aurélie BARILONE
Cheffe de service, VIFFIL SOS Femmes
« Depuis des années, nous travaillons pour que la voix des enfants exposés aux violences soit entendue et reconnue. Ce partenariat avec DAPAT est une étape décisive pour amplifier ce combat et donner à ces enfants la protection et l’avenir auxquels ils aspirent.»

Liliane DALIGAND
Présidente de VIFFIL SOS Femmes






